Shelter (2007)

Shelter est un film américain indépendant, tourné en vingt-et-un jours seulement, à San Pedro et Laguna Beach.

L'histoire est celle de Zach, un jeune homme qui mène une vie qui n'est pas à la hauteur de ce qu'il voudrait. Il est réservé, vit dans une famille dysfonctionnelle avec sa sœur Jeanne et son neveu Cody. Un neveu qu'il aime beaucoup et dont il doit s'occuper très souvent, car sa sœur n'est pas ce que l'on pourrait appeler une mère modèle. Elle sort beaucoup, aime boire avec ses amies, entretient des relations amoureuses difficiles, avale parfois des médicaments et c'est Zach qui prend la responsabilité de s'occuper de Cody. Il a renoncé à intégrer une école artistique pour s'occuper de son neveu et être plus présent dans sa vie. Il travaille dans un casse-croûte et l'océan, le surf, lui servent d'exutoire. Il a une petite amie avec qui ça ne va pas très fort. Tori voudrait plus, mais Zach se sent incapable de lui donner ce qu'elle veut. On ressent dès le départ la dualité qui l'habite.

Shaun est le frère aîné de Gabe, le grand ami de Zach. Ils ont une bonne différence d'âge. Quand Gabe s'absente de chez lui pour un moment, Shaun revient au bercail pour écrire un livre. Il fait alors la rencontre de Zach et les deux hommes se lient rapidement d'amitié. Ils font du surf ensemble, discutent beaucoup, s'occupent de Cody. Shaun est amusant et prend soin de l'enfant de façon positive. C'est une belle relation qui se développe entre les deux.

Shaun découvre aussi le grand talent de Zach pour les arts. Il le pousse à poser sa candidature à la CalArts, une école d'art. Il l'encourage et agit un peu comme un mentor pour lui. La différence d'âge est pour beaucoup, mais aussi la stabilité qu'inspire Shaun à Zach, qui n'a connu qu'une vie difficile et mouvementée.

Un soir qu'ils sont ensemble et discutent, Shaun embrasse Zach. C'est alors le début d'un grand bouleversement. Zach se remet difficilement en question. Il ne sait pas ce qu'il veut, ne comprend pas ce qu'il est et doit affronter sa famille et ses amis. Ce qu'il découvre auprès de Shaun, il ne l'a jamais connu. Le travail de l'acteur qui incarne Zach à l'écran, Trevor Wright, rend vraiment bien les tourments qui le grugent. Il doit faire le point sur sa vie, comprendre qui il est pour pouvoir s'ouvrir aux autres et accepter d'être lui-même. Si Shaun vit très bien son homosexualité, Zach se sent totalement perdu dans ce qu'il vit. Il est dérangé par ses propres émotions et les sentiments qu'il ressent pour Shaun. Il essaie d'expliquer à sa sœur pourquoi il dort parfois ailleurs, il essaie de faire face à son meilleur ami alors qu'il se sent totalement démuni pour expliquer ses choix. Zach est attachant et son tourment nous touche particulièrement.

Littéralement, "Shelter" signifie "abri" ou "refuge". On peut faire plusieurs parallèles entre le titre et l'histoire du film. Le personnage de Shaun peut représenter un refuge pour Zach, tout comme la mer où les deux hommes vont faire du surf. L'art, très présent dans le film, est aussi une sorte de refuge pour Zach: il l'utilise comme exutoire à ses émotions. Son art est d'ailleurs changeant et se modifie à mesure qu'il s'épanouit et devient qui il est réellement.

Pour le film, c'est l'artiste Ryan Graeff qui a travaillé à créer l'imaginaire de Zach. Son travail très urbain, me plait beaucoup. Deux œuvres du film sont plutôt mémorables: le dessin qu'a fait Zach de Cody, dans une cuisine, et qui fascine Shaun quand il met la main sur le cahier de croquis de Zach. Il y a aussi cette belle fresque peinte sur un mur, sur laquelle Zach travaille et qui prend tout son sens quand il tombe amoureux...

La musique du film est assez intéressante. Il s'agit de musique populaire, du pop, du rock et du rock indépendant. Plusieurs artistes ou groupes du Canada et des Etats-Unis y ont contribué. J'y ai découvert Shane Mack, dont cinq chansons sont présentes sur l'album. Son style s'apparente surtout au country et, même si c'est un genre que je n'affectionne pas particulièrement, j'ai bien aimé ce que j'ai pu découvrir de lui. La musique de Bill Ferguson me plait également beaucoup.

Même si Shelter a l'apparence par moments du film à petit budget, il n'en demeure pas moins intéressant à plusieurs niveaux. Il y a le contexte artistique et musical, qui est intéressant. L'histoire également. Les questionnements que le film met en scène ne sont pas juste l'apanage des homosexuels qui se cherchent. Tout le monde se questionne un jour où l'autre sur ce qu'il est réellement, sur ce qu'il veut et désire vraiment. Tout le monde rêve d'une vie à son image et prend, ou pas, les moyens de se la créer. C'est un propos universel.

J'ignore si ce film a été traduit, je l'ai visionné en anglais. Comme c'est un film indépendant, il n'a pas bénéficié d'une grande couverture médiatique, du moins pas en dehors des États-Unis. Il est donc plus difficile à trouver.

Le film a remporté plusieurs prix, dans de nombreux festivals au Canada et aux États-Unis.

La bande annonce du film: