Des monstres

Des monstresDionis Cerdà
Éditions Fides
302 pages

Résumé:

Dans un collège privé de Montréal, pendant une année scolaire, quatre jeunes gens âgés de 15 à 16 ans sont tour à tour séduits par leur professeur de français, le jeune et beau Ramos, qui les entraînera dans une spirale peut-être sans voie de sortie. Des monstres, c’est le désarroi d’adolescents délurés, trop souvent laissés à eux-mêmes. C’est encore l’égoïsme et la démission des parents et de la société. C’est surtout la solitude de chacun dans un monde aux repères brouillés.

Mon commentaire:

Ramos est un jeune professeur qui attire les regards. C'est un enseignant apprécié qui se rapproche très vite de certains de ses élèves avec qui il outrepasse son rôle de professeur. À
peine plus âgé que ses élèves, il entretient des relations ambigües avec des garçons et des filles qui le prennent pour amant. Il joue à la fois un rôle de confident, de mentor, de professeur et son ton paternaliste agace certains de ses étudiants.

La lecture de ce roman crée une certaine tension et plusieurs questionnements moraux. On suppose d'emblée que ces jeunes sont bien innocents et qu'ils subissent ce qu'ils vivent. Plus la lecture avance, plus on apprend à les connaître. On réalise alors qu'ils vivent des choses qui ne sont pas de leur âge. Qu'à quinze et seize ans, ils traînent un bagage et des expériences beaucoup plus complexes qu'il n'y paraît et qu'ils recherchent aussi l'interdit, les sensations fortes, l'envie d'être aimés, le plaisir.

Les parents sont absents et les jeunes n'ont pratiquement pas de règles. Personne ne les surveille, personne ne leur trace une ligne de conduite. S'ils rentrent à l'heure à la maison et
s'ils se présentent en cours, le reste de leur emploi du temps n'est pas questionné. Ils peuvent donc passer du temps à faire ce qu'ils veulent, à expérimenter avec leur professeur ou entre eux, sans soulever aucun questionnement. C'est un terreau fertile à l'abus et aux expériences précoces.

Ramos devient rapidement le pivot central de toutes les relations entre ce petit groupe d'élèves. Chacun fini par savoir ce qu'il fait avec les autres et sa présence s'interpose entre les
relations amoureuses qui pourraient se développer entre les élèves. Jalousies, crises, angoisse, amour blessé, détachement, colère, chacun vit des émotions difficiles à gérer. Entre eux, ils s'aiment, se détestent, ne se comprennent pas toujours, se trahissent entre eux. Ils ont chacun un squelette dans le placard et traîne avec eux leur peurs, leurs peines et leur trop grande solitude. À trop vouloir (ou pas) entrer dans le moule de cette société superficielle, ils finissent par se brûler... Ces jeunes grandissent trop vite et ont un passé compliqué fait de choses qu'ils ne devraient normalement pas vivre à leur âge. Les secrets s'accumulent et la tension entre eux - ainsi que dans le roman - devient de plus en plus oppressante.

Pour conserver la relation qu'ils entretiennent chacun de leur côté avec leur professeur, ils sont prêts à beaucoup. À tout. Même à défier l'autorité, à sacrifier l'un d'entre eux ou à frôler
l'immoralité. Ils vont très loin et on peut faire quelques parallèles avec l'atmosphère un peu étouffante du roman de Donna Tartt, Le maître des illusions. J'ai eu une pensée pour ce pavé à quelques reprises durant ma lecture.

Des monstres est un roman plutôt troublant. J'ai particulièrement aimé l'univers du personnage d'Henri, qui est un garçon très différent des autres, d'un niveau intellectuel qui ne cadre pas avec les autres jeunes. Il écrit dans des cafés, est constamment plongé dans la poésie et la littérature, et cultive la solitude. Abusé et intimidé, il demeure détaché de ce qui l'entoure et c'est ce qui fait de lui peut-être, le personnage le plus dangereux...

Un premier roman fascinant, dérangeant, qui porte bien son titre. À subir tout ce qu'ils subissent, à vivre des vies d'adultes qui n'ont rien de la douceur amère de l'adolescence, ils deviennent peu à peu des monstres.

Quelques extraits:

"Je suis trop jeune pour connaître tout ce que je connais." p.133

"Autrefois, la solitude lui aurait paru une vague notion, liée à la faiblesse ou au refus de s'intégrer. Maintenant, elle encombrait tout son univers, alors qu'il n'était ni faible ni rebelle. Rien n'expliquait sa présence." p.217

Commentaires (2)

1. Karine:) (site web) 2014-10-18

Oh my, on a eu une lecture tout à fait différente. Je suis d'accord avec le côté dérangeant mais je n'ai tellement pas accroché au style que ça a un peu gâché ma lecture. Je rajoute ton lien à mon billet, pour donner un autre avis. Mon personnage préféré a été aussi celui de Henri. J'aurais juste aimé un peu plus de sous-entendus, moins de trucs dits et explicités.

2. geneviev (site web) 2014-10-19

@Karine: j'aimerais bien lire ton billet! Il est en ligne? Je ne l'ai pas trouvé :(

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